Livre blanc : Comment se défendre face à une accusation de fraude fiscale ? (Partie 2)

II. Comment se défendre en cas d’accusation de fraude fiscale ?

Aux vues des conséquences d’une condamnation pour fraude fiscale, si le contribuable s’estime innocent et de bonne foi, celui-ci doit immédiatement plaider sa cause auprès de l’Administration fiscale.

Le droit à l’erreur permet au contribuable ayant commis une inexactitude ou une omission dans une déclaration fiscale de régulariser sa situation sans payer de pénalité. Dans le cadre de la régularisation, le contribuable devra régler l’impôt supplémentaire résultant de la correction de l’inexactitude ou de l’omission, auquel peut s’ajouter un intérêt de retard, mais aucune majoration ni amende. La régularisation peut avoir lieu à tout moment, y compris lorsque le redevable fait l’objet d’un contrôle fiscal. Pour bénéficier du droit à l’erreur, le redevable doit être de bonne foi et s’applique uniquement aux inexactitudes ou omissions (et non au dépôt tardif d’une déclaration ou à un paiement en retard). Toute erreur commise délibérément ne relève pas du droit à l’erreur, mais bien de la fraude fiscale.

Lorsque l’élément intentionnel de l’omission ou de l’inexactitude est caractérisée, il peut sembler impossible pour le contribuable d’échapper aux poursuites pénales ou fiscales. Et pourtant, depuis la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, les contribuables accusés de fraude fiscale peuvent bénéficier de mesures alternatives aux poursuites classiques. Désormais, en cas de poursuites pénales, il existe deux procédures de transaction. La loi de 2018 a étendu à la fraude fiscale deux procédures pénales de droit commun ayant pour but de simplifier et d’accélérer la répression de certaines infractions :

La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), dite procédure de « plaider-coupable » : elle permet à une personne poursuivie pour un délit d’éviter un procès lorsque cette personne reconnaît les faits qui lui sont reprochés et accepte la peine proposée par le procureur de la République. Cette procédure est enclenchée par la procureur de la République, d’office ou à la demande de l’intéressé, et est soumise à l’homologation du président du Tribunal judiciaire. 

La CRPC peut être une alternative intéressante en ce sens qu’elle favorise un règlement rapide de la procédure. La CRPC permet également de plafonner la condamnation d’emprisonnement puisque cette dernière ne peut être supérieure à 3 ans, ni dépasser la moitié de la peine encourue. En outre, le contribuable peut toujours refuser la proposition de peine faite par le procureur. Dans ce cas, son affaire sera jugée devant le Tribunal correctionnel pour un procès classique.
L’accompagnement par un avocat est essentiel en matière de CRPC. En effet, il pourra conseiller le redevable sur l’intérêt d’accepter ou non la proposition du procureur. Accepter une CRPCE n’est pas sans risque, puisqu’elle ne permet plus au redevable poursuivi de soulever d’éventuels vices de procédure. Il est donc parfois plus judicieux de refuser la peine proposée par le procureur et d’aller s’expliquer devant le juge.

Toutefois, la portée de la CRPC est limitée puisqu’elle porte uniquement sur les poursuites pénales. Le justiciable peut tout de même tenter de contester en parallèle les sanctions fiscales ou de négocier avec l’Administration fiscale. La CRPC n’empêche pas l’éventuelle victime d’obtenir une indemnisation de son préjudice.

Convention Judiciaire d’Intérêt Public (CJIP) : dans cette hypothèse, une personne morale accusée de fraude fiscale ne reconnaît pas sa culpabilité mais trouve un accord avec l'Administration fiscale. En effet, tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement, le procureur de la République peut proposer à la personne morale mise en cause pour fraude fiscale de conclure un CJIP pour éteindre l’action publique. En échange, la personne morale devra exécuter les obligations auxquelles elle s’est engagée dans la CJIP. Ces obligations, alternatives ou cumulatives, peuvent consister :



Dans le versement d'une amende d’intérêt public à l’Etat, dont le montant ne peut excéder 30% du chiffres d’affaires moyen annuel
Dans la mise en œuvre d’un programme de mise en conformité ses procédures de prévention et de lutte contre la corruption, sous le contrôle de l'Agence Française Anticorruption (AFA), pour une durée maximale de 3 ans
Dans la réparation des préjudices des éventuelles victimes

C’est une procédure dite « gagnant-gagnant » puisqu’elle permet au contribuable de ne pas être vu comme coupable, et à l’Administration fiscale de recouvrer de l’argent rapidement, et non au terme d’une procédure longue et coûteuse. La CJIP peut cependant mener au prononcé d’une amende d’un montant conséquent. Par exemple, en 2020, une CJIP a été signée avec la société Airbus avec une amende d’intérêt public s’élevant à plus de 2 milliards d’euros.

Enfin, en marge des transactions fiscales, le « règlement d’ensemble » permet à l’Administration fiscale de transiger avec des contribuables en cas de fraude fiscale, non seulement sur les pénalités, mais également sur les droits. Cette pratique est dépourvue de base légale et se fonde uniquement sur une note de la direction générale des impôts du 20 juin 2004. Cette note précisait que « dans certaines situations, les services peuvent être conduits à conclure avec l’usager un accord global qui inclut une atténuation des droits. Cet accord ne constitue pas une transaction au sens de l’article L. 247 du LPF mais un règlement d’ensemble du dossier ».

Conclusion

Alors que la liste des scandales fiscaux ne cesse de s’allonger (carrousel TVA sur les quotas de carbone, « Panama Papers », « Paradise Papers »), le législateur a souhaité faire évoluer le régime de la fraude fiscale. Si le montant maximum de l’amende a considérablement augmenté au cours de ces dernières années, le législateur a, en parallèle, accepter d’élargir le champ d’application des procédures de transaction. Les redevables poursuivis pour fraude fiscale disposent désormais d’une certaine marge de négociation auprès du parquet.

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